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Conclusion : les conditions d’une géographie expérimentale
 […] Un répertoire actuellement nous paraît mériter très particulièrement une solide vigilance critique, qui est la meilleure forme d’attention qu’on puisse lui accorder :  le répertoire de stations de la méthode scientifique expérimentale adaptée aux besoins de la géographie humaine. 
L’ensemble de cette thèse s’est efforcée d’obéir à des canons mais ils demandent à être regroupés d’une manière plus formelle pour qu’on perçoive mieux et leur cohésion géographique et leurs insuffisances. Le problème, on le sait, est d’ouvrir la réalité à l’aide de la réalité en la redoublant sur elle-même : le modèle consiste, en effet, à estimer, à partir d’observations mises en rapport, la valeur d’autres observations qui conservent leur valeur brute du terrain. D’où, bien sûr, les précautions qui agencent le répertoire en « deux blocs » aux fonctions complémentaires qui apparaissent sur le schéma-résumé ci-dessous.

















Au niveau du bloc heuristique s’élaborent les hypothèses de recherche et, en conséquence, le démontrable y voisine avec le non démontrable. Dans cette zone incertaine, l	a croyance de base en l’ordre s’enracine dans celle d’un pré-ordre : l'épistémé prétend que « l’idéal d’un savoir démontrable » est réalisable grâce au concept de modèle, répertoriable dans un vocabulaire transdisciplinaire mais « disciplinable » en paradigmes (orientation de recherche privilégiées) capables de représenter via les systèmes l’architecture des plans autonomes (niveau holoniques) de notre science, déléguable enfin grâce à la théorie – ensemble d’explications anticipées – au sous-bloc plus concret du tamis heuristique. Si la théorie affirme, sa fille (ou ses filles), l’hypothèse, rassemble le matériel le plus apte à transposer concrètement son affirmation en une question précise à la réalité : elle décide que « l’estimé » de la réalité, son « image », sera, par exemple, représentée par une formule de gravitation, l’observé, la réalité du terrain, par un relevé de flux. Le bloc heuristique a fini son travail, c’est au tour du bloc opératoire d’entrer en jeu.
Le tamis (ou test) statistique va renseigner sur la bonne tenue logique des préparatifs de l’hypothèse. Pour cela, après que la quantification a été arrêtée (ici, les logarithmes décimaux pour pouvoir calculer les coefficients de régression), l’analyse quantitative effectuée (ici, une régression multiple pour le modèle, une régression simple pour comparer les flux qu’il « prédisait » au flux de terrain), une série de tests statistiques évalue la valeur de la régression (F), la valeur des coefficients de cette régression (t), le niveau d’explication obtenu (R2) ; si pour ce dernier, le seuil de 0,64 au moins n’est pas atteint entre les estimés et les observés de la régression simple, les écarts sur toute la distribution géographique seront tels que l’analyse en deviendra très difficile. Ainsi appareillé, le tamis statistique nous a répondu au début qu’il fallait modifier le premier matériel sélectionné avant de passer à l’analyse géographique en considérant le type d’observations retenues pour la modélisation : aux zones d’origine-destination, il convenait de substituer des villes précises.
Le tamis (ou test) géographique commence avec ce test, géographique par excellence, que constitue une distribution spatiale, c’est-à-dire une répartition cartographique, de résidus : elle est le négatif de ce que le modèle n’a pas pris en compte ; elle nourrit donc l’analyse géographique à partir de la carte et de la capacité du géographe ; à lui de choisir, après réflexion, c’est-à-dire confrontation de la théorie et des conditions de terrain, dans le champ des opérateurs spatiaux, celui qui effacera l’écart entre l’estimé et l’observé, ceux ensuite qui l’effaceront systématiquement dans les mêmes situations mais dans des espaces de contrôle différents de l’espace expérimental. Cette distinction est fondamentale car la transférabilité géographique, seule, constitue le test suprême dans une science qui étudie l'organisation de l’espace : l’hypothèse doit sélectionner aussi soigneusement que possible et le territoire de rodage du modèle et les territoires de transplantation.
Cela fait, on retrouve son hypothèse infirmée ou confirmée. 
Dans le premier cas, on recommence en se posant des questions sur la pertinence de celle-ci, bien sûr, mais en vérifiant surtout très soigneusement la précision des données, nous voulons dire l’exactitude physique de leur mesure ; l’à-peu-près est absolument banni quand on veut reproduire la distribution géographique de valeurs de terrain : plusieurs essais n’ont pas dépassés le tamis statistique parce que deux mesures de distance avaient été interverties ; l’erreur corrigée, l’ajustement obtenu s’est révélé meilleur. Ce qui prouve non seulement  la sensibilité du modèle mais aussi la confiance qu’on peut avoir en sa fidélité : le même opérateur employé sur deux espaces différents donnera dans le même cas-type les mêmes résultats. Ces deux dernières qualités sont essentielles dès que l’on transforme des petites distances « chargées » dans leur petit espace d’une nette dissymétrie différentielle. 
Dans le second cas, si l’hypothèse est confirmée, on retourne d’où l’on vient, à son point de départ ; au moins a-t-on pris en chemin par la nouvelle connaissance produite un peu de ce « regard froid » dont le géographe a besoin pour aider à aménager l’espace où vivent les hommes. L’expérimentation en géographie, parce qu’elle lie méthodologiquement la théorie géographique au terrain, rejoint la géographie active puisqu’elle essaie, ainsi, de développer la géographie fondamentale.

Texte intégral de la soutenance